Tableau d'honneur
Publié le

Romain Bourboulou, ancien PhD Neuroschool, est lauréat du prix jeunes chercheurs de la fondation Bettencourt

Romain Bourboulou, ancien étudiant du PhD Programme de NeuroSchool, a reçu le prix "Jeunes Chercheurs" de la Fondation Bettencourt Schueller pour lui permettre de réaliser son stage post-doctoral dans les meilleurs laboratoires étrangers.

Temps de lecture estimé : 10 min

Romain Bourboulou, ancien étudiant du PhD Program de NeuroSchool, est lauréat du prix « Jeunes Chercheurs » de la Fondation Bettencourt Schueller. Créé en 1990, ce prix à distingué à ce jour 321 jeunes chercheurs pour leur permettre de réaliser leur stage post-doctoral dans les meilleurs laboratoires étrangers. Romain Bourboulou a choisi de réaliser son stage post-doctoral à l’University College de Londres (UCL) pour être dans le département à l’origine même du premier enregistrement des cellules de lieux (la légende dit même que c’est dans son bureau qu’à eu lieu la découverte !) et de côtoyer John O’Keefe, prix Nobel 2014 pour la découverte des dites cellules ! Mais alors, qui est Romain ? Sur quoi travaille-t-il précisément? Et, que sont les cellules de lieu ?

Romain Bourboulou

Romain Bourboulou est docteur en sciences, spécialisé en neurosciences. Il a réalisé sa thèse à l’Institut de Neurobiologie de la Méditerranée à Marseille sur la résolution du codage spatial dans l’hippocampe. Lors de cette thèse, il s’est attaché à mieux comprendre comment les informations du monde extérieur influencent notre carte cognitive. Pour cela, il a utilisé une combinaison novatrice d’enregistrements électrophysiologiques et d’une tâche comportementale en réalité virtuelle. Ses résultats de recherche démontrent pour la première fois que cette carte mentale est dynamique et qu’elle s’adapte localement en fonction de la disponibilité d’informations sensorielles dans un environnement. Il réalise maintenant un stage post-doctoral dans l'équipe du Prof Caswell Barry.

Romain Bourboulou a effectué sa thèse dans l’équipe de Jérôme Epsztein, co-encadré par Julie Koenig-Gambini, : « codage neuronal de l’espace et mémoire« , au sein de l’Institut de Neurobiologie de la Méditérannée (INMED). L’équipe de Jérôme Epsztein s’intéresse à la compréhension de la navigation spatiale et de son lien avec la formation de la mémoire épisodique, c’est-à-dire la mémoire des événements vécus avec leur contexte (date, lieu, état émotionnel). L’équipe est composée de talents pluridisciplinaires, ce qui lui permet de réaliser des études au niveau comportemental, intracellulaire et extracellulaire.

L’approche comportementale de l’équipe est assez innovante, puisqu’ils immergent des souris dans des environnements totalement virtuels grâce à la réalité virtuelle ! Et oui, des souris en VR ça existe ! Cet environnement contrôlé permet d’avoir la main sur les repères sensoriels externes dont dispose l’animal pour se situer dans l’environnement.

Au niveau extracellulaire, des électrodes d’électrophysiologie sont utilisées pour enregistrer l’activité de centaines de cellules pendant que les animaux explorent l’environnement virtuel. Pour les enregistrements intracellulaires, ils sont effectués par patch-clamp sur les neurones d’intérêts.

Dans un premier temps, il nous explique ce que sont les cellules de lieu. 

Les cellules de lieu de l'hippocampe

Romain Bourboulou a réalisé sa thèse principalement sur les enregistrements extracelullaires des cellules de lieu. Ce sont les cellules découverte par John O’Keefe, prix Nobel 2014, pour coder notre environnement. C’est-à-dire que notre cerveau possède des cellules qui codent notre position dans notre environnement, un peu comme un GPS qui traque notre position en permanence. Notre cerveau et plus exactement notre hippocampe, possède des neurones qui s’activent et transmette l’information sur notre environnement. Il faut voir ces neurones comme un ensemble nous permettant de former une représentation externe du monde qui nous entoure.

En menant des études en réalité virtuelle,  Romain a été capable de contrôler l’environnement des souris tout en enregistrant l’activité de centaines de « cellules de lieu » de l’hippocampe. Lorsque l’environnement est très pauvre visuellement ou très riche visuellement, que vont faire ces cellules, et plus globalement l’hippocampe ? Est-ce qu’il s’adapte de façon globale ? Ou bien de façon sélective en fonction du besoin ?

Romain Bourboulou

Méthode d'enregistrement

Configuration pour les enregistrements électrophysiologiques en extra-cellulaire.

Comment les cellules de lieu codent notre environnement ?

Romain a découvert que l’hippocampe s’adapte de façon globale et locale! Pour voir cela, il a étudié les champs de réponses des cellules de lieu, nommés champs de lieu (ce qui sonne assez bizarre en français!), ou « place fields » en anglais. Ce champ de lieu est défini par une zone spatiale donnée sur une carte cognitive, qui est une sorte de carte mentale de l’environnement. Chaque cellule de lieu s’active donc quand l’animal se trouve dans le champ récepteur qui lui est associé.

Les environnements pauvres et enrichis

Plusieurs sortes d'environnement ont été utilisés par Romain Bourboulou lors de sa thèse. Ci-contre, une photo de l'environnement en réalité virtuelle et trois représentations schématiques d'environnement pauvre (première ligne) ou enrichis (2ème et 3ème lignes). Dans la représentation schématique, vous pouvez observer les champs de lieu plus ou moins précis illustré par des cercles de couleurs plus ou moins grands. 

Comment les cellules de lieu codent dans un environnement pauvre ?

Dans un environnement pauvre, on a observé que moins de cellules de lieu sont activées, potentiellement car il y a moins de « choses » à voir dans l’environnement. Ce qui est intéressant, c’est que les champs de lieux codaient de façon moins précise dans cette condition. Ces champs de lieux étaient moins nombreux et plus larges.

Mais que se passe-t-il lorsqu’il y a beaucoup de stimuli dans l’environnement ?

Les cellules de lieux étaient plus nombreuses, plus stables et plus « précises », de surcroit à proximité des objets. Ce qui suggère que l’hippocampe peut s’adapter de façon globale et locale, potentiellement pour des raisons d’économies d’énergie, tout en maximisant la prise d’information. La représentation n’est pas complète dans notre hippocampe, mais les cellules ont des champs de lieu beaucoup plus précis.

romain bourboulou

Exemple de signal extracellulaire

Voici un exemple de signal extracellulaire enregistré par Romain Bourboulou. Nous pouvons voir plusieurs dizaines de canaux (électrodes) sur les 64 utilisées. Les petites déviation vers le bas sont des spikes (des potentiel d'actions) de cellules proches de l'électrode.

La "vague rapide" au milieu représente un "sharp wave ripple" qui est un évènement rapide pendant lequel se passent de façon préférentielle les réactivations liées à la consolidation d'information en mémoire.

Les résultats de recherche démontrent pour la première fois que la carte cognitive, représentation mentale de notre environnement, est dynamique et qu’elle s’adapte localement et globalement en fonction de la disponibilité d’informations sensorielles dans un environnement.

À la fin de son doctorat en octobre 2019, Romain Bourboulou n’en a pas fini avec l’exploration des cellules de lieux ! C’est pour cela qu’il décide de faire un post-doctorat, grâce à la bourse de la Fondation Betancourt, à l’University Collège de Londres dans l’équipe du Prof Caswell Barry. Un endroit mythique sur la découverte des cellules de lieux, puisque ce que c’est dans ce département « Biosciences » que les premières cellules de lieux ont été enregistrées. Si vous voulez étudier la cognition spatiale, c’est l’endroit où il faut être ! Romain ne s’est donc pas trompé en choisissant son post-doctorat. Ici, il a apprit une nouvelle technique : l’imagerie bi-photonique. Cette technique, permet de plonger au coeur du cerveau en plein fonctionnement, puisqu’elle permet de « voir » et d’enregistrer un film de l’activité in vivo des neurones. Pour ces deux années de post-doctorat, Romain va étudier les réactivations (replays) des cellules de lieu.

Comment mémorisons-nous notre environnement ?

Les réactivations des cellules de lieu seraient essentielles dans les phénomènes d’apprentissage et elles ont lieu pendant le sommeil ! Voici donc pourquoi il est essentiel d’avoir un bon sommeil en période de révisions 😉

De manière globale, chez la souris, une réactivation des cellules de lieu qui avaient été activées lors de l’exploration d’un environnement un peu plus tôt a été enregistrée. Il s’agirait d’une relecture neuronale, ces animaux rejouent des séquences de leur environnement durant leur sommeil. Comment a-t-on pu le savoir ? Grâce aux enregistrements extracellulaires ! Il a pu être observé que les neurones activés un peu plus tôt lors de l’exploration d’un environnement étaient ré-activés lors d’un moment d’inactivité, alors que le stimulus n’était plus présent !

 

Romain Bourboulou

Imagerie bi-photonique

Voici un exemple des toutes premières données obtenues par Romain Bourboulou dans le cadre de son post-doctorat. 

Et maintenant ?

Ce qui intéresse Romain maintenant est de savoir comment ce phénomène de réactivation est impliqué dans la consolidation de la mémoire.  Pour faire le lien, il essaye de coupler l’imagerie bi-photonique et les techniques d’électrophysiologies. Il espère ainsi en savoir plus sur la formation de la mémoire au sein de l’hippocampe.

Il aimerais mieux comprendre les mécanismes permettant un « transfert » de mémoire de l’hippocampe vers le cortex, une fois l’information connue. Il compte sur l’équipe du Prof Caswell Barry qui mêle neurosciences computationnelles et expérimentales pour pouvoir avancer également avec des modèles computationnels. Il a notamment appris à créer ses propres algorithmes pour pouvoir vérifier ces hypothèses de connectivité ce qui ouvre, selon lui, plus de perspectives de recherches. Il souhaite maintenant étendre ses compétences vers les neurosciences théoriques et computationnelles pour pouvoir compléter ses expériences et avoir des résultats d’études mêlant théorie et expérimentation.

Ingrid Meucci Chargée de communication
Auteur

Après la validation d'un master en neurosciences et d'un master en communication, je me suis spécialisée en communication neuroscientifique pour l'Institut NeuroMarseille.

Avez-vous apprécié ce contenu ?
Commentaires

Un avis ?

Votre avis nous intéresse

Description de la soumission d'un avis

Votre vote :
Votre avis nous intéresse